Depuis l’indépendance, des millions d’écoliers rejoignent les bancs d’écoles. Les lycéens s’interrogent souvent sur les nouveautés des programmes, les collégiens se demandent quels seront leur enseignants de l’année. Mais avant d’aller s’interroger sur « les nouveautés », définissons d’abord le métier d’enseignant, dont la journée mondiale a été célébrée hier, et le rôle de celui qui l’exerce.
L’enseignement, c’est la transmission des connaissances par une aide à la compréhension et à l’assimilation, et l’enseignant, c’est celui qui assure la tâche, inculque la pédagogie. Les enseignants d’aujourd’hui ressemblent-ils à ceux des années 70 et 80 ? Les « anciens » professeurs avaient-ils les moyens dont jouissent ceux d’aujourd’hui ? Chabane Hadj Ameur, 80 ans. Cet ancien directeur d’un collège en Kabylie parle avec nostalgie des « années d’or » qu’il a passé dans le secteur de l’éducation. Il indique que « tellement ils étaient omniscients et charismatiques, les enseignants éduquaient même en dehors de leur périmètre de travail. L’enseignement, tous paliers confondus, était une véritable porte ouverte sur la vie et le monde ». Il ajoute que « dès les premières années, l’élève était initié à un apprentissage pratique qui lui ouvrait les yeux sur son environnement ». Avec l’alphabet et les chiffres, dit-il, l’enfant touchait au fur et à mesure, à ces choses qui lui permettent de découvrir la vie, le cycle des plantes et la métamorphose des chenilles des quatre saisons, etc. Sur le plan social, « les gens les vénéraient pour leur sagesse et leur justesse ». La majorité des enseignants faisaient leur travail avec conscience « même s’ils étaient surveillés par la machine démagogique de l’époque ». Certes, il existe un programme national mais « chaque professeur doit prévoir pour son cours, un plan puis pour chaque chapitre, une progression, où il prévoit en particulier les moments où il va interroger les élèves pour les faire participer», a-t-il précisé. Il est fréquent que le directeur soit aussi un ancien professeur, de même qu’il arrive qu’il continue à enseigner, mais il peut aussi être un pur administratif. Concernant le déroulement de la scolarité, les élèves entraient à l’école à 6 ans et restaient dans le cursus scolaire 13 années contre 12 actuellement. Ils apprenaient à lire et à écrire durant les deux premières années primaires. Toutefois, dans certaines écoles, des élèves surdoués sautent de niveau avec l’accord des parents. « Grâce aux enseignants et aux professeurs, la classe est pour les élèves une seconde famille, et bien souvent, les anciens élèves devenus adultes resteront amis toute leur vie avec au moins certains de leurs anciens camarades de classe en compagnie desquels ils ont étudié pendant tant d’années », dira-t-il.
Le cadre de vie idéal
Pour ce qui est de la surcharge des salles, l’ancien directeur dira qu’à l’époque, les effectifs des classes étaient en général entre 25 et 28 élèves, mais pouvaient atteindre les 35 dans les
meilleures écoles très prisées. Les cours durent une heure, et ils sont séparés par des pauses d’un quart d’heure en moyenne. « Ainsi, les élèves restaient attentifs tout le temps »,
souligne-t-il. Et d’ajouter : « Les élèves, partagés en groupes, doivent s’occuper de leur salle et, chaque fin de journée, ils la rangent, mettent les chaises sur les tables et
balayent. On arrosait même les fleurs ». Certains responsables d’établissements organisaient même une sorte de compétition entre les classes bien entretenues. Il y avait des fleurs, des
rideaux, des cartes, des posters accrochés aux murs. Pour tout cela, les parents n’hésitaient pas à cotiser pour un tel embellissement. Si jamais un soir une salle se trouvait en désordre, le
directeur de l’école intervenait le lendemain. Côté hygiène corporel, les enseignants étaient très rigoureux : « Tous les matins, il fallait montrer les oreilles, les mains et les
ongles coupés, bien propres, sinon le châtiment était exemplaire. Le coup de règle sur les doigts faisaient tomber des larmes », se souvient le directeur. « Le défunt Mohamed Boudiaf
disait que l’école algérienne est sinistrée. Depuis, je n’ai pas vu les mesures concrètes entreprises pour la sauver du naufrage », regrette notre interlocuteur !
Autres temps, autres mœurs !
Que reste-t-il du dévouement des enseignants d’antan ? Ce siècle, autre en ses mœurs, demande un autre style. Avec les nouvelles technologies, l’enfant s’ouvre sur tout, mais généralement,
il a tendance à choisir la facilité. Maintenant, la majorité des enseignants s’accordent à dire que les professeurs d’aujourd’hui vivent avec leurs élèves une situation trop difficile et trop
décevante. Mme Toudert, PES, déclare que « les élèves actuels sont différents de ceux de l’époque et la société remet en question l’école et sa culture de façon trop radicale. Nous
connaissons aujourd’hui une crise de l’acte pédagogique ». Elle s’interroge sur la nature de l’éducation qu’elle doit donner à l’élève. Cette enseignante, qui s’apprête à aller à la
retraite, estime que le programme enseigné ne convient pas à l’âge mental des élèves. « Il est trop fort », dit-elle.